Vision

Actions européennes, Les étoiles montantes

Les actions européennes ayant largement surperformé leurs homologues américaines pour la première fois depuis des années, les investisseurs ont encore plus de raisons de s'interroger sur leur allocation régionale, leur degré de diversification et les opportunités qui s'offrent à eux. Les changements géopolitiques ont déclenché des évolutions qui sont susceptibles de prendre de l'ampleur et qui pourraient profiter aux marchés européens.

Auteurs

    Portfolio Manager

Résumé

  1. Après des années d'austérité, des vents favorables budgétaires créent un climat d'investissement attractif
  2. Les opportunités d'investissement ne se limitent pas au secteur de la défense
  3. L'innovation, l'IA, les consommateurs et la Chine rebondissent et figurent parmi les plus prometteurs

Ironiquement, lorsque Donald Trump a pris ses fonctions le 20 janvier 2025, c’est un Américain qui a mis le feu aux poudres pour relancer les marchés européens. L'approche isolationniste du 47e président en matière de commerce mondial et de sécurité a incité les dirigeants européens à prendre des décisions rapides, décisives et ambitieuses après des années de léthargie. Comme nous l'avons écrit récemment, 1 2 3 le marché européen offre un large éventail d'opportunités d'investissement qui vont bien au-delà des thèmes du réarmement de l'Europe et des infrastructures allemandes.

Le monde sous-pondère toujours l’Europe

Dans notre article d'août 2024, intitulé Les planètes s’alignent pour les actions européennes, nous avons mis en évidence l'écart de valorisation extrême entre les valeurs américaines et celles de la zone euro, ainsi que la dépendance excessive des valeurs mondiales à l'égard du marché actions américain. La surperformance d'environ 15 % depuis le début de l'année (voir figure 1) de l'Europe en dollars américains a réduit la décote sectorielle par rapport aux États-Unis à 27 % (contre environ 35 % à la fin de 2024)4, mais elle reste nettement plus importante qu'avant la pandémie.

Graphique 1 : Les valeurs européennes surperforment les valeurs américaines depuis le début de l'année

Source : Bloomberg, au 8 mai 2025.

Les performances passées ne préjugent pas des performances futures. La valeur de vos investissements peut fluctuer.


Les flux d'investissement ont commencé à se déplacer vers les marchés européens, mais restent modestes par rapport aux précédentes sorties de capitaux et au déséquilibre marqué de l'allocation géographique. Selon Bank of America, les titres européens ont enregistré des entrées de 27,4 milliards de dollars à la mi-avril. Bien qu'il s'agisse de l'afflux le plus important de cette période au cours des cinq dernières années, il contraste avec les 534 milliards d'USD de sorties cumulées depuis 2005. Ainsi, les opportunités offertes par des valorisations moins chères, un positionnement souple et une réorientation des flux d'investissement restent largement intactes.

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Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps.

Un nouvel espoir au milieu de vieilles habitudes

Comme nous l'avons souligné dans les notes précédentes, ces changements étaient à prévoir depuis un certain temps. Le pessimisme à l'égard de l’Europe en raison de la sous-performance à long terme de son marché, des troubles politiques et du manque d'innovations convaincantes en matière d'intelligence artificielle a pesé durablement sur le sentiment « vendre l'Europe », qui a atteint son paroxysme vers la fin de 2024.

L'avalanche de décrets américains a d'abord exercé une pression supplémentaire sur l'Europe, mais on peut honnêtement dire qu'elle a déclenché une réaction fort nécessaire de la part des dirigeants européens, en particulier en Allemagne, mais aussi plus largement au niveau européen. Deux thèmes principaux sont apparus :

  • Les dépenses d'infrastructure et l'assouplissement du plafond de la dette : Le récent train de mesures budgétaires de l’Allemagne comprend un fonds de 500 milliards d'euros pour la modernisation des infrastructures publiques au cours de la prochaine décennie. Ces mesures visent à stimuler la croissance économique. En outre, les dépenses de défense supérieures à 1 % du PIB seront exemptées de l’application des plafonds de déficit et les « Bundesländer » (États fédéraux allemands) ne seront plus tenus d'équilibrer leur budget. L'expansion budgétaire devrait profiter à des secteurs tels que la construction, l'énergie, la technologie et l'économie nationale allemande dans son ensemble.

  • Hausse des dépenses de défense : L'Allemagne prévoit de porter son budget de défense à 2,5-3 % du PIB, ce qui correspond à 60-70 milliards d'euros supplémentaires par an. La nécessité de réarmer l'Europe, compte tenu du retrait (partiel) des États-Unis en tant qu’ancien partenaire de l'OTAN, est également à l'origine de plans d'investissement au niveau européen. Ce coup de pouce devrait profiter aux principaux entrepreneurs européens du secteur de la défense et au secteur dans son ensemble. L'effet multiplicateur sur l'économie au sens large est relativement faible.


La réaction du marché à ces annonces a été euphorique. Si le plan d'investissement et l'assouplissement du frein à l'endettement en Allemagne ont été officiellement approuvés par le parlement sortant, les plans d'investissement européens plus larges, tels que ceux proposés par Mario Draghi5 ou la Commission européenne6, sont moins concrets. Bien que d'autres pays européens comme la France, l'Italie ou l'Espagne ne disposent pas de la même marge de manœuvre budgétaire que l'Allemagne, l'Union européenne dans son ensemble dispose d'une plus grande latitude en matière d’assouplissement budgétaire après des années de prudence. Cette situation contraste avec celle des États-Unis, dont les dépenses déficitaires ont alimenté la croissance, mais ont également fait grimper les niveaux d'endettement de manière significative.7

Nous attirons l'attention sur le fait que la réalisation de ces investissements est complexe. L'Europe est fidèle à sa vieille habitude de retarder, voire d’entraver, les réformes essentielles — comme en témoigne l’échec du chancelier allemand Friederich Merz à obtenir la majorité parlementaire dès le premier tour des élections, un fait inédit depuis la Seconde Guerre mondiale. Parallèlement, les États-Unis ont annoncé d'importants droits de douane réciproques, actuellement suspendus dans l’attente de négociations sur leurs niveaux définitifs. Toutefois, ces droits de douane ne seront pas entièrement levés et continueront de peser sur l'activité économique et le commerce mondial, atténuant ainsi les effets de la relance budgétaire européenne.

Au-delà des mesures budgétaires et du domaine de la défense, il existe un large éventail d'opportunités

Jusqu'à présent, les principaux bénéficiaires du marché actions ont été un petit groupe de sociétés allemandes spécialisées dans la défense, la construction et les infrastructures et dont les revenus sont fortement liés aux marchés nationaux. L'opportunité réelle peut être beaucoup plus large à long terme.

Le rapport 2024 de Mario Draghi sur « L'avenir de la compétitivité européenne »8met en lumière non seulement la nécessité d'investir dans les technologies de la défense et de l'énergie, mais aussi dans les technologies numériques, l'innovation et l'amélioration de la productivité, comme le montre la figure 2.

Graphique 2 : Besoins d'investissements massifs et profonds en Europe 2025-2030 (en milliards d'euros)

Source : Rapport Draghi, septembre 2024.

En outre, au-delà des mesures budgétaires, les consommateurs européens ont l'un des taux d'épargne les plus élevés (~15 % contre ~4 % aux États-Unis) et disposent d'un total de 33 000 milliards d'euros d'actifs financiers bruts, dont une grande partie se trouve sur des comptes de dépôt à faible rendement qui peuvent être mobilisés pour l'investissement et la consommation. L'Union européenne de l'épargne et de l'investissement est une idée qui circule depuis des années et qui est relancée aujourd’hui afin de dynamiser les marchés de capitaux de la région et exploiter cet argent qui dort.

Les secteurs qui bénéficieront du renouveau de l'Europe

Les conditions préalables à des opportunités d'investissement intéressantes dans les valeurs européennes cotées en bourse sont réunies et largement réparties entre les secteurs et les thèmes. Indépendamment des business models,9 l'augmentation de la souplesse budgétaire crée des gagnants au-delà des bénéficiaires actuels de l'augmentation des dépenses de défense. Voici une liste (non exhaustive) des opportunités :

  • Adeptes et catalyseurs de l’IA : Alors que l'Europe souffre d'un manque de modèles fondamentaux d'intelligence artificielle (IA) et d'infrastructures (centres de données, services Cloud, serveurs, puces)10, plusieurs industries et entreprises bénéficient de l'adoption et de la mise en œuvre de l'IA. Il s'agit d'entreprises de logiciels, de semi-conducteurs et d'équipements, de biens d'équipement, de services aux entreprises et de réseaux d'énergie.

  • Moteurs de productivité : Le rapport Draghi souligne que la faiblesse de la productivité et l'écart qui se creuse avec les États-Unis sont les principaux facteurs de la sous-performance de la croissance à long terme de la région. L'amélioration de la productivité grâce à la numérisation, à l'automatisation industrielle, à une meilleure commercialisation, à un financement accru et à l'innovation contribuerait à combler l'écart et à revigorer la croissance. Les secteurs de la technologie, de l'éducation, des produits pharmaceutiques, de la finance, du conseil et des services professionnels sont essentiels pour atteindre cet objectif.

  • La force des consommateurs : Les prix de l'énergie et la hausse des taux ont fait passer le taux d'épargne d'une moyenne déjà élevée de 11 % à environ 15 %. En comparaison, les consommateurs américains dépensent trop et n'épargnent que 3,9 %,12, ce qui correspond à une baisse significative par rapport à la moyenne de 7 % enregistrée au cours des deux années précédant la pandémie. Les marchés de consommation européens sont généralement moins avancés que ceux des États-Unis. Les deux offrent un potentiel de rattrapage important (par exemple, en ce qui concerne la pénétration du commerce électronique et les paiements).

  • Rebond de la Chine : Les industries et les entreprises européennes sont fortement exposées aux marchés émergents (~20 %, Chine comprise) et à la Chine (~8,5 %). La contre-performance de la Chine de ces dernières années a été intégrée et les investisseurs mondiaux ont largement sous-pondéré l’Empire du Milieu. De petites améliorations économiques et des mesures de relance pourraient stimuler les industries et les entreprises qui font des affaires dans la région. Les secteurs de la consommation, des technologies médicales, des semi-conducteurs (équipement) et des produits industriels en sont des bénéficiaires potentiels.

  • Le déficit en matière d’innovation : Outre une démographie défavorable, le principal facteur à l'origine de l'augmentation de l'écart de productivité aux États-Unis est la faiblesse des taux d'investissement (environ la moitié des dépenses américaines) et la lenteur de la réorientation des dépenses de recherche et d'innovation des secteurs européens traditionnels vers les nouvelles technologies de rupture. La technologie, les produits pharmaceutiques, les sciences de la vie et le secteur industriel pourraient bénéficier de la réduction de ce déficit.

  • Infrastructures (logement, santé, finances, etc.) : Les infrastructures ont été mises en avant comme l'un des principaux domaines d'investissement dans le cadre du train de mesures budgétaires allemand et des propositions au niveau européen. L'infrastructure ne doit pas se limiter aux routes, aux ponts et aux bâtiments. Son champ d'application comprend également la santé, l'éducation et l'infrastructure financière, qui jouent tous un rôle essentiel dans la croissance à long terme. Des secteurs tels que la santé, les services financiers, les communications et les industries liées à l'infrastructure devraient donc en bénéficier.

  • Réduction de l'intensité énergétique : Les industries à forte intensité énergétique (EII) européennes pâtissent de prix de l'énergie plus élevés qu'aux États-Unis, ce qui réduit leur compétitivité sur les marchés mondiaux. Garantir l'accès à un approvisionnement énergétique stable, se concentrer sur les besoins de décarbonation, l'indépendance énergétique et la baisse des coûts de l'énergie aidera les IIE à surmonter un désavantage concurrentiel et stimulera la croissance et la rentabilité. Les secteurs de l'industrie, du ciment, des produits chimiques et des autres matériaux pourraient en être les principaux bénéficiaires.

  • Déficit de financement : La transition vers des dépenses budgétaires plus expansives pourrait être soutenue par la mobilisation et le rapatriement des investissements privés par le biais de divers canaux, comme le prévoit l'Union de l'épargne et de l'investissement. Les prêts bancaires, les marchés privés, la titrisation et les investissements sur les marchés publics peuvent contribuer à combler ce déficit de financement.


Figure 3 : Les thèmes d'investissement émergeant du renouveau de l’Europe en matière d’investissement et de dépenses

Source : Robeco Schweiz AG.

Ces entreprises sont énumérées à titre d’information uniquement et ne relèvent pas nécessairement de la stratégie Robeco Sustainable European Stars. Ceci ne constitue aucune recommandation d’achat, de vente ou de conservation de titres particuliers. Aucune déclaration n’est faite quant au fait que ces exemples sont des recommandations passées ou actuelles, qu’ils devraient être achetés ou vendus, ni quant à savoir s’ils ont été fructueux ou non.


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Notes de bas de page

1 Les planètes s’alignent pour les actions européennes, Sustainable European Stars, Robeco, août 2024.
2 Sustainable European Stars, bilan annuel 2024 - Robeco, janvier 2025
3Perspectives mensuelles, Actions européennes - Après la pluie vient le beau temps, 8 janvier 2025.
4Morgan Stanley, European Equity Strategy, Moment of Truth, 11 mars 2025.
5Rapport Draghi, septembre 2024.
6Commission européenne, Livre blanc conjoint sur l'état de préparation de l'Europe en matière de défense à l'horizon 2030, Bruxelles, 19 mars 2025
7J.P. Morgan, Equity Strategy : Certains des aspects positifs des États-Unis et des aspects négatifs de l'Europe, qui existent depuis longtemps, pourraient-ils s'inverser ?
8Le rapport Draghi : Une stratégie de compétitivité pour l'Europe (Partie A) et Analyse approfondie et recommandations (Partie B).
9Les planètes s'alignent pour les actions européennes, août 2024 ; Présentation d’une vue des business models attractifs et diversifiés en Europe.
10Les « hyperscalers » sont tous des entreprises américaines (Amazon, Microsoft, Google) et détiennent une part de marché de 70 à 75 % en Europe, le reste étant réparti entre les fournisseurs européens.
11Eurostat, 13 janvier 2025, Q4 2024
12Federal Reserve Bank of St. Louis, Personal Saving Rate, mars 2025.

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