Tendances de consommation en 2025 : retail media, divertissement et esthétique injectable

Nous restons optimistes concernant les dépenses de consommation et les perspectives pour nos thèmes à long terme en 2025. Les dépenses de consommation aux États-Unis ont fait preuve d’une grande résilience en 2024, comme le montre le graphique 1, bien que ces dépenses soient surtout le fait des consommateurs à hauts revenus. Ce segment aisé a bénéficié de la hausse des valeurs d’actifs, tandis que les consommateurs à faibles et moyens revenus ont réduit leurs dépenses en 2024 malgré une croissance salariale saine, car ils ont été plus durement impactés par l’inflation. Nous nous attendons à ce que ces tendances se poursuivent en 2025, même si la modération de l’inflation devrait offrir plus de marge aux consommateurs à revenus modestes pour augmenter leurs dépenses. Alors que les récents chiffres d’une inflation stagnante ont déçu le marché obligataire, l’indicateur clé à surveiller reste, selon nous, le marché du travail américain. Avec un taux de chômage aux États-Unis se situant toujours autour de son plus bas niveau historique de 4 %, nous pensons que la sécurité de l’emploi continuera à soutenir des niveaux élevés de dépenses.

En novembre, Marc Pritchard, Chief Brand Officer chez Procter & Gamble, a qualifié la publicité via le retail media de véritable « game changer », soulignant qu’elle offre des rendements jusqu’à quatre fois supérieurs à ceux d’autres formes de publicité. Par retail media, il entend une forme émergente de publicité opérée par les détaillants ou reposant sur leurs données de première main. Les marques qui vendent par l’intermédiaire d’un détaillant achètent des publicités qui s’affichent sur le site web et l’application du détaillant. Par ailleurs, les marques achètent des données de première main au détaillant pour atteindre les clients sur des canaux tiers, comme les réseaux sociaux ou d’autres sites web et applications. Quelques exemples sont présentés ci-dessous.

Tout comme les investisseurs, les annonceurs sont toujours à la recherche des opportunités offrant les meilleurs rendements, ce qui explique pourquoi le retail media attire rapidement des dépenses publicitaires considérables. Une innovation particulièrement prometteuse pour Procter & Gamble est la publicité « shoppable », qui permet aux clients d’effectuer des achats en un seul clic. Cette expérience fluide élimine le fossé entre la communication et l’achat, ce qui représente une amélioration significative par rapport aux publicités télévisées traditionnelles qui reposent sur le fait que les consommateurs se souviennent du produit au moment de l’achat.

À l’échelle mondiale, les revenus publicitaires liés au retail media ont explosé, passant de 43 milliards d’USD en 2019 à 124 milliards d’USD en 2023, soit près du triple. Selon l’agence publicitaire Magna, les revenus du retail media devraient augmenter de 18 % en 2024 et de 13 % en 2025. Aux États-Unis et en Europe, le géant de l’e-commerce Amazon a été le moteur de la croissance du retail media, faisant passer ses revenus publicitaires de 9 milliards d’USD en 2018 à une prévision de 56 milliards d’USD en 2024. Il est important de noter que ces revenus génèrent des marges bénéficiaires élevées. Inspirés par le succès rapide d’Amazon dans la génération de cette source de revenus lucrative, d’autres détaillants s’empressent de développer leurs propres activités de retail media. Walmart, par exemple, a vu ses revenus publicitaires augmenter d’environ 30 % en 2024, tandis que Costco signale que les marques se bousculent pour y faire de la publicité. Cette tendance illustre la manière dont les plus grands détaillants du monde tirent parti des revenus publicitaires dégageant de fortes marges pour compléter leurs activités de vente au détail traditionnellement à faibles marges.

Les dépenses des consommateurs sur les plateformes d’e-commerce, où apparaissent la plupart des annonces de retail media, sont le principal moteur de la croissance de la publicité via le retail media. Un autre facteur clé est l’évolution du paysage du ciblage publicitaire. Les restrictions imposées par Apple sur le partage des données des utilisateurs et l’abandon progressif par Google du suivi des cookies de tiers dans son navigateur Chrome ont compliqué le ciblage publicitaire pour les marques et les détaillants. En revanche, le retail media offre une solution : les investissements des détaillants dans des données clients de première main de haute qualité permettent un ciblage publicitaire plus efficace. En outre, comme le retail media intègre la publicité et l’achat dans un même écosystème, il facilite la mesure en boucle fermée, ce qui permet aux marques d’évaluer avec précision leur retour sur investissement publicitaire. Cette capacité est particulièrement attrayante pour les annonceurs, qui sont devenus dépendants de la mesure précise de leurs performances.

Globalement, la publicité via le retail media devrait connaître une croissance soutenue dans les années à venir. Les détaillants sont désireux d’étendre cette source de revenus à forte marge, tandis que les marques sont tout aussi enthousiastes à l’idée d’allouer leurs budgets à des canaux qui offrent un meilleur retour sur investissement.

Après une forte baisse pendant la pandémie, le trafic aérien mondial de passagers a dépassé en 2024 les volumes enregistrés en 2019. Bien que certaines régions se trouvent encore en phase de reprise, notamment le trafic international au départ de la Chine, les consommateurs continuent de montrer un vif intérêt pour l’exploration du monde. Selon l’Association du transport aérien international (IATA), le trafic aérien mondial de passagers a progressé de 10,7 % en glissement annuel, grâce à une augmentation de 15,6 % dans la région Asie-Pacifique. Toujours selon l’IATA, après avoir atteint un plancher à 31,9 en 2020, l’indice des passagers-kilomètres payants (RPK) a grimpé à 103,6 en 2024 par rapport à un niveau de référence de 100 en 2019. Aux États-Unis, la Transportation Security Administration a indiqué que le nombre de passagers aériens contrôlés a augmenté de 5 % en glissement annuel en 2024, pour atteindre un peu moins de 904 millions, soit un niveau supérieur de 6,3 % à celui de 2019.

Les dépenses des consommateurs en matière d’hébergement ont contribué à faire augmenter les recettes totales du secteur de 12 % par rapport à 2019. Les consommateurs étant de plus en plus à la recherche d’expériences uniques, des services comme Airbnb et VBRO ont redéfini le marché de l’hébergement en rendant disponibles à la location des résidences secondaires via des plateformes en ligne. Selon McKinsey, les dépenses consacrées à ces hébergements alternatifs ont augmenté de 49 % depuis 2019. Cela dit, les hôtels représentent toujours 74 % des dépenses d’hébergement des voyageurs. Selon le fournisseur de technologie de voyage Amadeus, les réservations dans les boutique hôtels devraient presque doubler d’ici à 2032 pour répondre à la demande de différenciation.

La réservation de voyages a été l’un des premiers marchés de détail à devenir numérique, les agences de voyages en ligne ayant remplacé les bureaux physiques autrefois omniprésents. À mesure que le marché du voyage numérique évoluait, les moteurs de recherche sont devenus la première étape pour les voyageurs qui planifient un voyage, et les compagnies aériennes et les hôtels ont investi pour inciter les consommateurs à réserver directement. À l’avenir, le déploiement de l’IA sera une tendance intéressante à suivre. Les voyageurs se tournent de plus en plus vers des services tels que ChatGPT pour les aider à planifier leurs itinéraires de voyage. Une prochaine vague d’agents d’IA capables non seulement de donner des idées, mais aussi d’agir et d’effectuer des réservations au nom de la personne pourrait encore perturber davantage le secteur.

Il y a dix ans, le streaming vidéo était une forme de média de niche, représentant un faible pourcentage à un chiffre du temps passé par les consommateurs à regarder la télévision. À l’époque, la plupart des observateurs du secteur pensaient que la distribution par Internet resterait marginale ou que les studios hollywoodiens et les chaînes de télévision finiraient par prendre le pas sur les nouveaux venus, aidés par un vaste catalogue de franchises établies. Aujourd’hui, le streaming représente 41,9 % des heures d’audience télévisée aux États-Unis et des services de streaming tels qu’Apple, Amazon et Netflix obtiennent régulièrement des nominations aux Emmy Awards et aux Oscars. En réponse, les grands médias historiques se sont empressés de lancer des services de streaming concurrents, générant des milliards de pertes, tandis que le rythme des annulations des forfaits coûteux de la télévision par câble s’est accéléré. Une vague de consolidation s’en est suivie et, au cours des cinq dernières années, les entreprises de médias et de télévision par câble historiques ont vu leur valorisation chuter de plus d’un tiers. Pour aggraver encore la situation pour les médias traditionnels, les services de streaming s’attaquent désormais au marché mondial de la publicité télévisée, évalué à 163 milliards d’USD et qui représente près de 60 % du marché restant de la publicité hors ligne.

De même, malgré la stagnation de la croissance du divertissement interactif dans la période post-Covid, la plus grande sortie de divertissement de 2025 ne viendra probablement pas d’un studio de cinéma hollywoodien ou d’un artiste musical, mais d’un jeu vidéo. Après plus d’une décennie de développement, la sortie prévue en 2025 de Grand Theft Auto VI de Take Two Interactive devrait générer 2,5 milliards d’USD de ventes au détail. À titre de comparaison, le film leader de l’année dernière, Vice Versa 2 de Disney, a généré 1,7 milliard d’USD de ventes de billets, et la tournée Eras de Taylor Swift a rapporté 2 milliards d’USD sur deux ans. En outre, le lancement attendu de la prochaine console de Nintendo, associé à la poursuite des efforts de Sony et de Microsoft dans le domaine des jeux par abonnement, devrait contribuer à relancer la croissance de cette industrie qui pèse 180 milliards d’USD.

Chaque année, dans les semaines précédant la fête de Thanksgiving aux États-Unis, on observe un pic notable des recherches Google pour le mot « botox ». Cela semble indiquer que les gens cherchent à donner un coup de jeune à leur apparence avant de retrouver leur famille et leurs amis. Ce pic observé avant Thanksgiving met en évidence la demande croissante des consommateurs pour des produits de beauté qui offrent des résultats immédiats et visibles. En 2023, environ 15 millions de procédures esthétiques injectables ont été réalisées, dont 9 millions de traitements au botox et 6 millions avec des produits de comblement (voir graphique 6). Le botox est principalement utilisé pour réduire les rides, tandis que les produits de comblement servent surtout à restaurer le volume et les contours du visage.

Entre 2019 et 2023, le nombre de procédures esthétiques injectables dans le monde, y compris le botox et les produits de comblement, a augmenté de façon remarquable de 36 %, dépassant de loin la croissance du marché global de la beauté qui s’élève à 14 % sur la même période. L’Oréal, la plus grande entreprise de produits de beauté au monde, en a pris acte et a acquis une participation de 10 % dans Galderma, une entreprise suisse spécialisée dans les produits esthétiques injectables et qui est entrée en bourse au début de 2024. La croissance s’observe dans toutes les régions, toutes les cultures, tous les genres et toutes les tranches d’âge. C’est notamment chez les jeunes que les procédures ont connu l’augmentation la plus spectaculaire, avec une hausse de 56 % chez les 19-34 ans et de 51 % chez les 35-50 ans. Cette évolution reflète la prise de conscience accrue des consommateurs sur l’importance de garder une apparence jeune et de traiter les signes de vieillissement précoce.

Les réseaux sociaux amplifient la prise de conscience et normalisent les traitements injectables. Les influenceurs et les professionnels de la santé mettent souvent ces procédures en avant, en insistant sur leur sécurité, leur efficacité et leur facilité. Des plateformes comme Instagram et TikTok, avec leur accent sur le visuel, ont popularisé les transformations « avant et après ». Les tendances régionales donnent également une image intéressante de l’adoption au niveau mondial. Les États-Unis sont en tête des procédures esthétiques injectables, avec 3,3 millions d’interventions en 2023. Les marchés émergents d’Asie et d’Amérique latine connaissent également une croissance rapide, stimulée par l’expansion des classes moyennes et l’augmentation des dépenses des consommateurs en matière de soins personnels. En outre, les hommes deviennent un groupe démographique important, avec une augmentation significative des procédures chez les hommes, représentant environ 15 % des traitements totaux dans le monde en 2023.

La popularité croissante des procédures esthétiques injectables s’aligne sur les tendances de consommation plus larges, axées sur des produits promettant des résultats garantis et quasi immédiats. Que ce soit pour une occasion spéciale ou dans le cadre d’une routine de beauté à long terme, les produits injectables offrent une combinaison convaincante de facilité et d’efficacité, ce qui en fait une composante de plus en plus importante de la culture moderne de la beauté.

La stratégie Global Consumer Trends est investie dans les opportunités que nous avons identifiées pour 2025 au travers de nos trois thèmes principaux. La transformation numérique de la consommation représentait 50 % des positions de la stratégie à la fin de 2024, incluant les bénéficiaires des sous-tendances Divertissement numérique et Retail Media (Netflix, Alphabet et Amazon). Notre thème santé et bien-être, qui représentait 32 % de la stratégie à la fin de 2024, comprend des entreprises à croissance rapide qui profitent de la tendance des produits esthétiques injectables. Enfin, le thème de l’essor de la classe moyenne, qui représentait 18 % de la stratégie à la fin de 2024, comprend des marques locales à croissance rapide qui sont moins exposées aux barrières commerciales, ainsi que des détaillants qui bénéficient déjà de l’expansion du retail media.